« J’arrête de fumer », un programme qui amène des milliers de personnes à arrêter de fumer ensemble
Le programme de sevrage tabagique «J’arrête de fumer» déployé sur Facebook est une première dans le milieu de la prévention. Sa méthode innovante se fonde sur la force des réseaux sociaux et la dynamique communautaire.
Lancé pour la première fois en Valais de septembre 2015, le programme a rencontré un franc succès. Il s’est étendu à la Suisse romande en mars 2016, dans les cantons de Vaud, Valais, Genève, Neuchâtel, Fribourg et Jura. Chaque canton possède sa page Facebook. Au total, 7’000 romands se sont inscrits sur les 6 pages cantonales et ont participé.
Comment fonctionne-t-il ? Au travers de trois éléments : des conseils quotidiens, la solidarité de groupe entre les candidats et un suivi intensif sur la durée, tout cela sur Facebook.
Des conseils quotidiens
Les participants inscrits arrêtent de fumer, ensemble, le même jour. Dès cette date-clé, ils reçoivent tous les jours sur la page Facebook de leur canton un conseil ou une explication pour les aider à se débarrasser de leur addiction. Ainsi, dès le 20 mars 2016, les candidats à l’arrêt ont reçu chaque matin un conseil en désaccoutumance sous forme de publications sur la page propre à leur canton de résidence. Ces publications, qui suivent le rythme du processus d’arrêt, se calquent également sur le rythme des participants et l’actualité cantonale.
Une solidarité de groupe
De plus, les participants forment une grande communauté virtuelle où chacun peut partager son expérience et obtenir du soutien de la part d’autres participants. Les 7’000 participants mènent ensemble leur combat contre la cigarette. Rassemblés sur le même support (la page Facebook), ils se soutiennent, s’engagent, dialoguent entre eux. Les candidats peuvent donc trouver non seulement un soutien virtuel, mais aussi se rencontrer physiquement. Par exemple, des candidats se sont rencontrés pour pratiquer une activité sportive ou pour échanger. Chaque dimanche soir a lieu une discussion de groupe, où les participants sont amenés à faire un bilan de leur situation et discuter entre eux.
Un suivi intensif
Enfin, chacun peut également bénéficier d’un suivi personnalisé en posant des questions, que ce soit en public ou en privé. Pour aider les participants, l’équipe de « J’arrête de fumer » assure une permanence de 6 heures à 23 heures, 7 jours sur 7, durant toute la durée du programme. L’équipe est constituée à la fois de Community Managers, de professionnels de la désaccoutumance et de médecins. Ils interviennent à différents niveaux pour coacher les participants, et répondre individuellement à toutes les questions et les demandes d’aide.
Sortir son smartphone plutôt que son paquet de cigarettes
Facebook devient un véritable refuge, dès lors qu’une envie de cigarette se fait ressentir. L’envie de fumer dure environ 3 minutes. Pour résister, les candidats sont encouragés à venir sur la page Facebook « J’arrête de fumer ». Sortir son téléphone portable plutôt que son paquet et se changer les idées durant les 3 minutes difficiles. Quelle que soit l’heure du jour ou de la nuit, il y aura toujours quelqu’un sur les 7000 participants ou quelqu’un de l’équipe de connecté et prêt à dialoguer.
Recrutement et inscription des participants
Le programme se divise en plusieurs phases. Avant l’arrêt en soi surviennent une phase de recrutement et d’inscription des participants, ainsi qu’une phase de préparation à l’arrêt, avec de nombreux conseils pratiques.
Pour participer, les fumeurs qui souhaitent arrêter doivent s’inscrire sur la page Facebook « J’arrête de fumer » de leur canton, en mentionnant publiquement leur envie d’arrêter. Ils reçoivent un message d’accueil personnalisé avec un numéro et deviennent alors des «candidats ». L’inscription et toute la participation au programme, d’une durée de 6 mois, est gratuite.
Des contenus complémentaires axés sur l’alimentation et l’activité physique
En plus de conseils de désaccoutumance et de motivation, le programme met l’accent sur la lutte contre les facteurs de rechute. La prise de poids en est un. Des conseils pratiques concernant l’alimentation et l’activité physique sont ainsi intégrés hebdomadairement. Le sport est un puissant allié contre le tabac, il aide à faire baisser l’irritabilité née du sevrage de la nicotine et à limiter également la prise de poids.
Activité sportive en groupe

Des candidats neuchâtelois réunis lors du BCN Tour, avec leur coach sportif, Victor.
Résultats positifs: des taux de réussite impressionnants
Une évaluation externe, menée par des experts[1], a été financée par le Fonds de prévention du tabagisme (FPT).
Après 3 mois, les résultats montrent que le programme a réussi à induire un changement de comportement tabagique auprès de 40 % des candidats[2], soit 2’800 personnes. En détail :
- 23% ont complètement arrêté de fumer.
- 17 % essaient toujours d’arrêter mais fument encore occasionnellement.
Au terme du programme, soit après 6 mois, ce sont 37,6% des participants qui ont changé de comportement vis-à-vis de la fumée :
- 13.5% ont complètement arrêté de fumer.
- 19.6% poursuivent leur démarche d’arrêt tout en fumant encore occasionnellement.
- 4.5% ont diminué leur consommation de cigarettes.
Ce résultat positif de 13,5% de candidats ayant réussi l’arrêt correspond à 1’450 Suisses romands, devenus non-fumeurs.
Décrochage en cours de participation ? Pas de panique, l’opération rattrapage !
Pour aider les candidats ayant décroché et repris leur consommation en cours de programme, il a été décidé de lancer une « Opération rattrapage ». Cette opportunité s’est ainsi déclinée en deux groupes Facebook privés :
- Un groupe destiné à l’essai d’un nouvel arrêt du tabac, avec une nouvelle date fixée. 470 membres se sont inscrits, ce qui représente 6,7% du total des inscriptions au programme initial du 20 mars.
- Un groupe destiné à une diminution progressive de la consommation de tabac, sans pour autant fixer une date d’arrêt. 168 membres se sont inscrits, ce qui représente 2,4% du total des inscriptions au programme initial.
Un succès de masse par le nombre, la mobilisation et la force communautaire
Comment expliquer un tel succès du programme ? Premièrement, le programme est accessible et gratuit. Les participants rejoignent le programme, car ce dernier est facile d’accès et ne nécessite pas de démarches compliquées pour s’inscrire. Il est disponible en tout temps et en tout lieu. Tout cela motive les candidats à se lancer, sans qu’ils aient forcément cherché à arrêter avec de l’aide avant.
Deuxièmement, le nombre de participants mobilisés entre en compte. Presque la totalité, soit 91 % des candidats ont tenté d’arrêter. Cela montre l’efficacité du programme dans sa capacité à potentialiser une intention d’arrêter de fumer. Le programme fonctionne de manière non différentiée auprès de toutes les franges de la population. Par ailleurs, elle incite des personnes qui n’avaient pas forcément l’intention de suivre un programme spécifique à tenter et à réussir l’arrêt de la cigarette.
Troisièmement, la dynamique communautaire instaurée par le programme est une des clés de la réussite. Le fait de s’inscrire pour se lancer dans l’arrêt avec d’autres candidats et une participation active favorise la réussite. De même, une consultation régulière de la page Facebook tout au long du programme augmente les chances de victoire. De manière générale, le sentiment d’appartenance à la communauté, tout comme l’identité d’ex-fumeur, a un impact positif sur le succès.
Et la suite ? Vers une personnalisation de l’aide
L’impact de cette nouvelle approche repose surtout sur sa capacité à atteindre simultanément des milliers de personnes[3], sur le même support : Facebook. Sur la page Facebook « J’arrête de fumer », les participants trouvent un recueil de conseil, peuvent s’exprimer, partager leurs difficultés et discuter avec d’autres. Pourtant, certains candidats n’arrivent pas à lutter et résister contre l’envie de fumer et replonge dans la cigarette. Ces derniers auraient besoin d’une aide plus soutenue, plus rapide et plus personnalisée… surtout pendant les moments difficiles où l’envie intense de cigarette se fait ressentir. C’est sur cet aspect que l’équipe de « J’arrête de fumer » travaille en ce moment.
L’abandon des candidats selon la durée du programme

Les candidats craquent en grande majorité dans les 20 premiers jours du programme.
En tant que véritable innovation en matière de prévention du tabagisme, le programme « J’arrête de fumer », il devrait être réitéré en Suisse romande et un projet pilote en Suisse allemande pourrait voir le jour dans les mois à venir. Pour aider encore mieux les fumeurs à arrêter, le programme réfléchit sans cesse à des améliorations à apporter.
[1] L’évaluation a été menée par un consortium d’experts constitué du Behaviour Change Lab (une entreprise spécialisée dans la promotion de la santé), du Groupe de Recherche en Psychologie de la Santé (Université de Genève), et du Groupe de Recherche sur l’Influence Sociale (Université de Genève). L’évaluation porte sur 1’040 candidats qui s’étaient inscrits spontanément au programme. Ils ont été recrutés quelques jours avant d’entamer leur tentative d’arrêt afin de ne pas induire de biais de sélection. Les inscrits ont complété un premier questionnaire quelques jours après le début de leur tentative, puis un deuxième 3 mois après. La moyenne d’âge des sondés est de 37 ans, dont 74% de femmes et 26% d’hommes.
[2] L’évaluation porte sur un échantillon de 1’040 candidats.
[3] Ce qui n’est pas possible dans le cadre d’interventions individuelles ou en petits groupes.
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